Texte de nini
Pierre Boulez est un compositeur, pédagogue et chef d'orchestre français né à Montbrison dans la Loire le 26 mars 1925.
Il est une personnalité influente du paysage musical et intellectuel1 français contemporain.
Il reçoit des cours de piano à l’âge de sept ans. Après des études secondaires à Montbrison dans une institution catholique, il est admis en classe de mathématiques spéciales à Lyon puis décide de s’installer à Paris en 1942 pour se consacrer définitivement à la musique. Il est l'élève d'Olivier Messiaen en 1944 en classe d'harmonie au Conservatoire de Paris qu'il quitte brutalement au printemps 1945 pour aller étudier le sérialisme avec René Leibowitz. Mais jugeant son enseignement trop rigide quant à l’application des techniques héritées de la seconde école de Vienne, il prend également ses distances avec ce dernier dès l'automne suivant et finit assez vite par retrouver une complicité avec Messiaen : « Echanger Messiaen contre Leibowitz, c’était échanger la spontanéité créatrice, combinée avec la recherche incessante de nouveaux modes d’expression contre le manque total d’inspiration et la menace d’un académisme sclérosant » racontera-t-il plus tard à Antoine Goléa.
Il compose durant cette époque sa Première Sonate pour piano (1946) qui, plus encore que la Sonatine pour flûte et piano, effectue la synthèse des influences récentes du jeune compositeur. Puis se trouvent ses cantates Le Visage nuptial et Le Soleil des eaux, appuyées sur des poèmes de René Char et souvent décrites comme sa période lyrique, ainsi que sa 2e sonate pour piano (1948) écrite à 23 ans, chef-d'œuvre du « premier Boulez », d’un lyrisme véhément prenant pour cadre le modèle de la sonate beethovénienne tout en poussant plus loin l’exploration des techniques sérielles.
Au début des années 50, influencé par le « Mode de valeurs et d’intensités » d'Olivier Messiaen (1949), Boulez s’oriente vers un sérialisme généralisé à d'autres paramètres que les hauteurs dans Polyphonie X et surtout dans l'austère mais fondamental 1er livre des Structures dont l'aridité se fait source d'une sève nouvelle2 : dans cette œuvre pour deux pianos, il fait table rase de toutes réminiscences stylistiques et vise ce qu’il appelle une « pulvérisation furieuse de la continuité », cherchant d’abord à faire « cligner les oreilles » – y compris les siennes ! - pour ensuite reconquérir une symbiose nouvelle entre hauteurs, dynamiques et durées ; démarche similaire à celle d’un joueur de flipper d’abord confronté aux ricochets chaotiques des billes contre les obstacles - certes contraignants mais non moins ludiques - qu’il finit par apprivoiser par des actions bien senties pour en extraire un mode de jeu plus personnel. Par cette attitude, Boulez recherche en fait un couplage optimal entre système et idée3. Très critiqué sur cette œuvre, il fustigera alors autant les détracteurs du sérialisme que leurs épigones, les premiers baissant un peu vite les bras devant ce nouveau terrain de jeux tandis que les seconds, succombant au joies de la découverte, s’y abandonnent parfois jusqu’à une soumission excessive (d’où la brouille avec Leibowitz) sans toujours parvenir à transformer l’essai.
Avec ses « Deux études » pour bande magnétique, Boulez poursuit sa quête d’un sérialisme plus généralisé en se livrant à des expériences au studio de musique concrète de Pierre Schaeffer mais l’entente avec ce dernier n’est pas aisée du fait de leurs préoccupations esthétiques radicalement opposées autant que le seront leurs ouvrages respectifs : Penser la musique aujourd'hui et le Traité des Objets Musicaux, qui n’œuvrent pas dans les mêmes sphères de l’écoute. Le musicien d’écriture qu’est Boulez préfère, comme ses prédécesseurs, compter sur sa forte personnalité pour combiner les sons et semble craindre dans les recherches de Schaeffer le risque de se laisser embobiner par des sons à la trop forte personnalité, « tout aimable qu'elle soit ».4 En effet, de même que la forme abstraite, très contrainte du 1er livre des Structures évoqué au paragraphe précédent se voyait prise en mains puis vivifiée par Boulez, ce dernier exige aussi de la matière sonore - instrumentale ou électroacoustique - qu’elle puisse se plier à sa volonté. « Je te raconterai toutes les engueulades que j’ai eues avec Schaeffer : ce serait matière à un énorme in folio ! » rapporte-t-il à John Cage en 1953 lors de leurs échanges épistolaires avant que la prise de conscience de leurs propres divergences esthétiques finisse elle aussi par avoir raison de leur amitié par-delà l’Atlantique.