Charles-Valentin Alkan, né Charles-Valentin Morhange1, le 30 novembre 1813 à Paris, mort dans la même ville le 29 mars 1888, est un pianiste et compositeur français. Se rattachant à la tradition de grande virtuosité de l'époque romantique, initiée par Paganini au violon, puis au piano par Frédéric Chopin et Franz Liszt, il est considéré comme le plus important représentant français de l'école de piano romantique.
Né de parents juifs, au sein d'une fratrie (cinq frères et une sœur) de musiciens qui adoptèrent tous le nom de Alkan — prénom du père, Alkan Morhange, qui tenait une école élémentaire réputée pour son enseignement musical — Charles-Valentin est d'abord un enfant prodige entrant à 6 ans au Conservatoire de Paris. Il étudie l'harmonie, l'orgue et le piano avec des professeurs tels que Joseph Zimmermann, qui fut aussi le professeur de Georges Bizet, César Franck, Charles Gounod, et Ambroise Thomas. Il obtient le premier prix pour le piano en 1824, pour l'harmonie en 1827, pour l'orgue en 1834. Il est à 17 ans un virtuose réputé, rivalisant avec Franz Liszt ou Sigismond Thalberg.
Surnommé « le Berlioz du piano » par Hans von Bülow, il a cependant été peu présent au concert : dès l'âge de 20 ans, il se retire de la vie publique, manifestant une forte misanthropie, et se consacre à la composition. Pour gagner sa vie, il donne des leçons : il devient un pédagogue réputé vers lequel les élèves de Chopin se tournèrent à la mort de celui-ci. Il donne tous les ans Six petits concerts, salle Erard, où il présente en intermède quelques-unes de ses œuvres, au milieu d'un répertoire très classique.
En 1844, Charles-Valentin Alkan reprend les concerts. Il espère succéder à Joseph Zimmermann au Conservatoire de Paris, mais c'est Marmontel qui obtient le poste. Il quitte de nouveau la vie publique après 1848 et y revient en 1855 avec la publication de ses Douze Études dans tous les tons mineurs, op. 39.
Il meurt à 74 ans, selon la légende écrasé par sa bibliothèque alors qu'il saisissait le Talmud. Officiellement, il s'agit d'un « accident domestique ».
Ses compositions ont été longtemps méconnues et restent encore peu enregistrées. Elles sont pourtant particulièrement originales et personnelles et d'une extrême difficulté d'exécution.
Comme Frédéric Chopin, Alkan a écrit presque exclusivement pour le piano. Ses œuvres les plus importantes sont la Grande Sonate pour piano « Les Quatre Âges de la vie », op. 33, et ses Études, comparables en difficulté et en complexité aux Études d'exécution transcendantes de Liszt. Si les Études dans tous les tons majeurs, op. 35, ressemblent encore aux publications de son temps, les Études dans tous les tons mineurs, op. 39, constituent une somme pianistique de 300 pages, sans équivalent à l'époque2. Le recueil est dominé par une Symphonie et un Concerto. Le fait de donner de tels titres à des œuvres pour piano solo traduit bien l'ambition d'Alkan qui est de conférer une dimension symphonique au piano.
Multipliant les difficultés techniques, Alkan y affectionne, en particulier, les groupes d'octaves et d'accords obligeant l'interprète à des extensions et des déplacements très rapides, les gammes et les arpèges qui fusent, les notes répétées et les batteries donnant parfois l'impression d'un mouvement perpétuel, comme dans Le Chemin de fer, op. 27, évocation virtuose de la fuite en avant d'un train ; enfin, une riche texture polyphonique et polyrythmique2. En dehors des grandes pièces de concert, longues et éprouvantes, Alkan sait faire preuve d'un remarquable talent de miniaturiste, comme dans ses 48 Esquisses op. 63 de 1861 ou l'abrupt Scherzo diabolico (de l'op. 39) qui fait résonner le rire de Méphistophélès.