Joseph Woelfl est un compositeur et pianiste virtuose autrichien, né à Salzbourg le vendredi 24 décembre 1773 et mort à Londres le jeudi 21 mai 1812.
À la même époque, très impressionné par ses talents d'improvisateur et de compositeur, il dédie à Beethoven, ses sonates opus 6. Les œuvres sont comparées plus au style de Clementi qu'à celui de Haydn ou Mozart. L' Allgemaine Musikalische Zeitung — le fameux journal avait été créé la même année — s'en fait écho :
« Elles sont dans l'ensemble à peu près dans la manière des meilleurs travaux de Clementi, mais avec beaucoup plus d'érudition, quoique parfois avec moins de délicatesse. La première sonate est la préférée de l'auteur de ce compte-rendu, bien qu'on y trouve quelque légers souvenir d'une sonate de Mozart. Dans la deuxième, l' Andante mérite une mention spéciale en tant que spécimen de chant simple mais beau. La modulation en si mineur de sa seconde phrase (mesures 11-12) n'est pas seulement surprenante, mais d'un effet très agréable. La troisième sonates se soucis trop peu d'unité. »
— Allgemeine Musikalische Zeitung, Leipzig, 15 janvier 1799
Le duel avec Beethoven
Il devient le principal « rival » de Beethoven, de trois ans son aîné, dans un duel pianistique, comme il y en eut quelques un à l'époque, dans les salons de la villa Grunberg du Baron Raimund Wetzlar von Plankenstern, « devant une société nombreuse mais choisie » (Seyfried). L' Allgemaine Musikalische Zeitung s'en fait écho :
« Les opinions sont partagées quant à savoir lequel à la préférence du public, toutefois, il semble que la majorité penche en faveur de [Woelfl]. [...] Le jeu de Beethoven est très brillant, mais moins délicat et se rend coupable d'imprécision. Il est à son plus grand avantage dans l'improvisation. [...] Sur ce plan, Woelfl n'est pas à sa hauteur. Mais Woelfl a pour lui de réussir des traits qui paraissent impossibles avec une aisance, une précision et une netteté vraiment surprenante (ce en quoi il est aidé par une grande dimension de ses mains), et de toujours jouer (en particulier les Adagios) de façon si plaisante et insinuante que non seulement on admire, mais on éprouve du plaisir. Rien d'étonnant que Woelfl tire avantage de ses manières aimables, par opposition au caractère quelque peu hautain de Beethoven. »
— Allgemeine Musikalische Zeitung, Leipzig, 22 avril 1799
Ignaz von Seyfried (1776-1841), le créateur de Fidelio, rapporte dans le Ludwig van Beethoven's Studien (écrit conjointement avec Haydn et Albrechtsberger et publié en 1832), plus de trente ans après les faits :
« Assis face à deux pianoforte, ils improvisaient parfois alternativement sur des thèmes qu'ils se donnaient l'un à l'autre et créèrent ainsi plus d'un caprice à quatre mains qui, s'ils avaient pu être notés à l'instant, aurait assurément défié le temps. Sous le rapport de l'habilitée mécanique il eut été difficile, impossible peut-être, d'adjuger la palme à l'un des rivaux : et cependant la nature avait traité bien favorablement Woelfl, en lui donnant des mains d'une grandeurs si prodigieuses qu'il atteignait des dixièmes aussi facilement que d'autres peuvent embrasser des octaves, et qu'il pouvait exécuter des deux mains de longs passages à cet intervalle avec la rapidité de l'éclair. »
— Ignaz von Seyfried
Les deux hommes semblent se respecter mutuellement, et leur « rivalité » ne pas nuire à une amicale et cordiale joute :
« Il se respectaient, car ils étaient les mieux placés pour s'apprécier. [...] Pour que le génie de Beethoven ait pris plaisir à ces tournois maintes fois renouvelés, pour qu'il ait accepté de partager avec son rival les faveurs du monde musical viennois, il fallait en vérité que ce Woelfl possédât de magnifiques ressources, une instruction des plus solides jointe à un tempérament des plus rares. »
— Ignaz von Seyfried
Quelques années plus tard lors d'un voyage à Vienne, Ignaz Pleyel rendit compte de ses sentiments dans une lettre :
« Enfin, j'ai entendu Beethoven. Il m'a fait grand plaisir en préludant. Il ne prélude pas froidement comme Woelfl, il fait tout ce qui lui vient dans la tête et il ose tout. »
— Ignaz Pleyel, Lettre à sa mère, 1805
Paris